Hommage à Patrice Bachy


Au moment où nous écrivons cet hommage, notre ami Patrice nous a quittés depuis à peine trois semaines, le 2 juin 2022, emporté par un cancer fulgurant. Le 19 mars il participait encore à un CA de notre association dont il était un moteur incontesté.

Nous étions une dizaine de camarades pour l’accompagner une dernière fois dans le petit cimetière de Saint-Cirgues près de Figeac et résonnent encore dans nos cœurs les chansons de Brassens, Cabrel, et celle de Pierre Bachelet, « Marionnettiste », que ses enfants et petits enfants rassemblés autour de sa tombe chantaient entre rire et larmes, dans l’émotion d’une famille recomposée mais unie.

 Mais dis-moi tout
Marionnettiste
Mon cœur de bois soudain s’inquiète
Que fais-tu donc de tes artistes
Après la fête ?

Et puis sur la petite scène de théâtre qu’il avait aménagée dans sa grange, parce qu’il aurait été le premier à chanter avec nous, nous avons entonné « Les saints et les anges » la chanson irrévérencieuse de la promo 66 des Mines de Nancy.

D’autres camarades qui n’avaient pas pu venir à Figeac, se réunissaient à Paris pour partager le souvenir de Patrice.

Notre émotion, celle de toute une promo restée très unie, témoigne de la place que tu avais prise dans notre groupe, Patrice, par ton énergie chaleureuse et mobilisatrice tournée vers les autres. La fulgurance de ton départ nous laisse étourdis dans l’incompréhension qu’une vie si active et rayonnante qui souvent nous entrainait puisse s’interrompre si brutalement.

Chef scout en arrivant à l’école des Mines de Nancy, les valeurs portées par la réforme de Bertrand Schwartz et les cours d’expression corporelle de Mytho Bourgouin vont rapidement orienter ta formidable énergie et ton ouverture aux autres vers tes premiers engagements : élu membre de la troïka en première année, secrétaire général du Festival International du Théâtre Universitaire de Nancy en deuxième année (en juin68 !) sous la houlette de Jack Lang. Tu rejoins ensuite le CUCES et l’INFA, deux organismes créés par Bertrand Schwartz dédiés à la formation continue des adultes en mettant en œuvre des méthodes pédagogiques innovantes.

Puis, c’est la Caisse des Dépôts à Paris où tu feras l’ensemble de ta carrière. Tu y conduis des projets de développement rural, d’intercommunalité, de rénovation urbaine pour ensuite intervenir sur le financement des universités et le pilotage de réseaux européens de recherche (6ème PCRD).

Délégué syndical CGT, militant du parti socialiste depuis 1976, l’arrivée de François Mitterrand au pouvoir en 1981, fait de toi un élu au conseil du 7ème arrondissement de Paris entre 1983 et 1995 où tu côtoies Rocard et Chevènement. Ta péniche amarrée au port de Solférino à mi-chemin du musée d’Orsay et de l’Assemblée nationale, a dû être le siège de débats passionnés ! Puis tu te détournes de la politique politicienne pour t’investir dans de nombreuses associations comme « Agir à Paris », « Solidarité nouvelle face au chômage » ainsi que les « clubs Cigales ».

La retraite va te permettre de donner libre cours à toutes tes passions : passion des abeilles, passion des étoiles, passion des hommes de Neandertal et autres Homo sapiens, passion des femmes, passion du théâtre, passion de la reliure, …il fallait toujours aller jusqu’au bout.

Cette retraite tu choisis de la passer dans une ferme près de Figeac dont tu tombes amoureux ; beaucoup de camarades y feront escale profitant de la chaleur de ton accueil.

La passion de la Mauritanie va te cueillir en 2006 lorsque notre camarade Ishac Ould Ragel, qui venait d’organiser un voyage pour notre promo dans son pays, décède juste avant notre départ. Le voyage sera maintenu à la demande de sa famille et donnera naissance à l’association qui porte son nom.

Rapidement tu t’y investis comme si Ishac nous avait transmis plus qu’un message : une mission. Durant près de 15 ans, en première ligne et très souvent sur le terrain tu conduis avec l’aide constante de la famille d’Ishac, la rénovation de l’école de Zemzem (village natal d’Ishac), l’installation d’une salle informatique, et bien d’autres projets comme le jumelage entre l’hôpital de Nouakchott et l’hôpital Louis Mourier à Colombes.

Tu consacres tes 3 dernières années à la rédaction d’une biographie d’Ishac Ould Ragel publiée sur ce site. Cette biographie, tu la destines d’abord aux Mauritaniens pour qu’ils connaissent mieux l’un de leurs pères fondateurs que tu admires.

Tu diras de lui à la fin du petit livre que tu lui as consacré : « Il n’avait pas changé le monde, il voulait seulement le rendre meilleur. Il avait essayé de convaincre et, surtout, d’entraîner avec lui tous les Mauritaniens ».

Ton frère Alain qui te connaissait si bien pense que cette phrase te résume parfaitement ; nous aussi.

Nous partageons notre douleur et nos pensées avec Marie-Claire ta compagne, ta famille et tes amis dont nous étions.

Au revoir Patrice, c’est si peu dire que tu nous manques.